Les revues de L’Association

Voici l’encart sur les revues de L’Association que j’ai écrit pour le collectif ACME. Il ne manque plus que l’introduction, à écrire avec Tanguy Habrand et Maud Hagelstein.

L’Association a édité ou édite trois revues : Lapin, OuPus et L’Éprouvette.

La famille des léporidés tient une place importante au sein de L’Association. Le nom de la première revue de la maison, Lapin, est un hommage au personnage créé par Jean-Christophe Menu, Lapot, qui inspirera le Lapinot de Trondheim.

L’histoire de Lapin s’inscrit dans la longue tradition de fanzinat qui a précédé la revue. Comme le rappelle le « petit historique pour néophytes » à la fin des derniers catalogues, Menu crée dès 1982 un fanzine lycéen, Le Lynx à tifs, que l’Aanal (l’Association pour l’Apologie du 9e Art Libre) publiera de 1984 à 1986. Il fut ensuite question, dès 1988, de concevoir une revue chez Futuropolis. Labo ne connaît qu’un numéro, en 1990, l’année de création de L’Association (à la Pulpe). Apparaît dès lors la nécessité, pour les fondateurs, de lancer une revue dans laquelle ils peuvent publier leurs créations. Lapin naît en 1992.

La revue connaît trois « formules » différentes, qui correspondent finalement à quatre séries. La première formule et série, de 1992 à 1999, voit paraître 25 numéros. Monochromes au départ (la couleur vient avec le numéro 16), les livraisons comprennent de 92 à 140 pages quand leur publication atteint son rythme de croisière (de semestrielle, elle devient trimestrielle), soutenue par une équipe fidèle. On y trouve des récits souvent longs, qui parfois s’étalent sur plusieurs numéros. Beaucoup seront republiés en livres par la suite. La deuxième formule concerne les numéros 26 à 32, parus en 2001 et 2002. Présentée comme « prenant le contrepied de la Première Formule », elle mobilise la quadrichromie pour un esprit censément plus « comix », sur 68 pages quasiment bimestrielles. Sa durée restreinte laisse supposer un succès mitigé. La troisième formule sera encore plus brève : trois épais numéros seulement (sur quatre prévus, le 36 ne voyant pas le jour à la suite de la destruction involontaire des originaux par le feu). Dans cette série, il s’agit finalement moins d’une revue que de trois anthologies, dont la dernière (septembre 2006) est en partie thématique, consacrée à la réinterprétation d’une bande dessinée connue. L’émergence d’une nouvelle génération s’accompagne d’un retour aux sources : depuis février 2009 reparaît une quatrième série qui reprend le mode opératoire de la première formule.

L’OuPus, organe de l’OuBaPo, s’identifie mal à une revue même si elle se présente comme telle : elle n’a ni périodicité ni format spécifique et son contenu n’est pas organisé selon des rubriques récurrentes. Si le premier numéro comportait une part importante de théorie, les suivants se concentrent plutôt sur les exercices et les résultats de performances collectives.

C’est dans L’Éprouvette qu’il faut chercher les traces des réflexions critiques et théoriques que L’Association a apporté au champ de la bande dessinée. Si Menu, dans les éditoriaux de Lapin, du Rab’ de Lapin et des catalogues, a toujours pris position et explicité ses points de vue, il fallut attendre 2006 pour qu’un organe critique collectif voit le jour. Prolongeant la collection du même nom, L’Éprouvette a connu une existence brève mais sulfureuse, se sabordant au bout de trois numéros. Polémique et politique, la revue, qui ne cesse de grossir au fil des livraisons, aborde la notion d’avant-garde, critique le système de la dédicace, questionne le plagiat et Angoulême et opère un retour réflexif sur sa propre position. Toujours à la recherche de légitimité, les catalogues de la maison la présente comme une « revue littéraire et artistique qui dépasse de loin les limites de la bande dessinée ». On peut affirmer au contraire que L’Éprouvette fut une tentative tout à la fois sérieuse et plaisante d’affirmer l’irréductibilité et les potentialités de la bande dessinée dans ses développements les plus contemporains. Une réussite éphémère mais brillante, qui connut un succès de librairie important pour ce type de publication.

 

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